Journée de pays Trégor-Goëlo - le 24 septembre 2013 - visite du patrimoine de Plouaret et environs

La journée a commencé à l'église de Plouaret, près de laquelle se déroulait le marché hebdomadaire. Sous le porche de l'entrée sud se trouve actuellement un groupe sculpté de l'époque gallo-romaine connu sous le nom de cheval de Saint-Mathieu (le nom de la chapelle près de laquelle il a longtemps séjourné) ; ce groupe datant probablement du 3e siècle, sévèrement dégradé lors du passage à la religion chrétienne, fait partie d'un ensemble de statues classées sous le nom de "cavalier à l'anguipède" que l'on trouve à plusieurs exemplaires en Bretagne, mais aussi à l'est de la France et en Allemagne. Le modèle le plus usuel représente Jupiter sur un cheval qui terrasse un monstre, en général barbu et à queue de serpent. Celui de Plouaret diffère de ce modèle car le monstre est une sirène, donc de sexe féminin. Ces groupes sculptés d'une taille supérieure à 1 mètre étaient fixés en haut d'une colonne de plusieurs mètres, et étaient donc visibles de loin, sur une voie romaine importante et près d'un point d'eau, probablement proches de bâtiments d'auberge pour recevoir les voyageurs. Ce mythe religieux s'est perpétué dans la religion chrétienne par saint Georges à cheval terrassant le dragon ; un type intermédiaire est visible au Louvre dans le département égyptien : un bas-relief copte d'Horus à cheval terrassant un crocodile : cet animal a pu faciliter le passage au mythe du dragon aux longues dents auquel le Moyen-Age a ajouté des ailes.


Le cavalier à l'anguipède de Plouaret

Le groupe de Plouaret a perdu le corps et la tête du cavalier, la tête et l'encolure du cheval et la tête de la sirène, ce qui en fait un objet assez informe, que l'on a du mal à identifier. Ci-contre, un essai de restitution des parties disparues par imitation de groupes similaires moins dégradés. La statue de Plouaret est de style assez grossier, probablement l'oeuvre d'un sculpteur local n'ayant pas la formation de la statuaire romaine classique.


essai de reconstitution

L'église Notre-Dame de Bonne Nouvelle

La visite de l'église, dédiée à Notre-Dame de Bonne-Nouvelle, est ensuite commentée par Marie-Thérèse Mahé, qui nous présente celle belle construction des XVe et XVIe siècle, commencée par les Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem ; elle fut agrandie à triple nef et 9 travées au XIXe siècle. Beaucoup de vitraux de l'église sont de belles œuvres de style traditionnel, même s'ils sont de facture moderne. La grande verrière du chevet est un chef d'oeuvre du genre, la plus belle du Trégor. Le maître-autel comporte une table monolithique de plus de 5m de long, et son retable date du XVIIe siècle. L'église comporte huit enfeus, quatre autels latéraux. Les hauts des colonnes de la nef ont été décorés par les blasons des différentes familles nobles de l'ancienne paroisse (dont Le Vieux-Marché fut séparé en 1866).
La chapelle du transept ouest est celle de la maison de Keranrais, tandis que la maison de Keramborgne, autre famille importante de Plouaret, fut à l'origine de la construction de la chapelle Sainte-Barbe, à 100 m de l'église. Une chaire en bois du XVIIe siècle comporte de nombreux panneaux sculptés. Un orgue Holdich d'origine anglaise datant du XIXe siècle a été acheté récemment et installé sur le côté droit de la nef. Le tour de l'église à l'extérieur permet de voir quelques gargouilles du XVIe siècle sculptées en formes de personnages ou d'animaux grimaçants.


Statue de N.D. de Bonne Nouvelle


Statue de saint Yves, avec son sac à procès

Après la visite de l'église de Plouaret, quelques kilomètres vers le sud nous emmènent à la fontaine Saint-Jean, dont la chapelle proche a disparu. Récemment restaurée, elle est un bel exemple de fontaine religieuse et utilitaire, puisque le lavoir du quartier utilisait l'eau sortant de la fontaine.


fontaine saint-Jean

Guernanchanay

Un peu plus loin, le manoir de Guernanchanay est un superbe bâtiment Renaissance, aujourd'hui inhabité, qui a appartenu aux familles Loz, du Cosquer, de Keranrais... Un magnifique porche à échauguettes permet l'entrée dans la cour, où l'on peut imaginer la vie qui animait autrefois ce bel ensemble.

Le repas se déroule à Trégrom, où nous accédons en passant par Le Vieux-Marché. Le restaurant Ch'ti Klakenn, repris par un jeune couple originaire du Nord, assure une cuisine copieuse et très moderne avec des produits locaux. L'église de Trégrom est dédiée à saint Brandan, dont le tombeau est supposé être le sarcophage mérovingien que l'on peut voir sur la pelouse de l'ancien cimetière. Après le repas, la visite de l'ancien presbytère, aujourd'hui aménagé en gîte pour touristes, nous montre une rénovation réussie dans un ensemble de vieux bâtiments qui sont agrémentés d'un très grand jardin compartimenté en jardin de curé d'autrefois, fleurs traditionnelles et verger...

L'église Note-Dame de Consolation du Vieux-Marché, que nous visitons ensuite, est une superbe réalisation en néo-gothique des années 1880 dans le style de Viollet-Le-Duc ; le maximum de pierres anciennes a été conservé, et une riche statuaire ancienne orne l'édifice, avec des éléments de décoration provenant souvent de chapelles disparues ou en ruines.


la statue de N.D. de Consolation


la fontaine N.D. de Consolation

Un crochet vers le sud pour voir les travaux de restauration (en cours) de la fontaine Notre-Dame de Consolation et de son muret où les pélerins pouvaient s'asseoir.

 

Nous passons ensuite devant le manoir Renaissance à double porte d'entrée de Goas-Froment :
il appartient aujourd'hui à Christian Kulig, auteur du livre "Châteaux et manoirs" du Trégor, qu'il a illustré de nombreux dessins personnels. Il possède dans son manoir une belle collection d'épis de faîtage.

 
le manoir de Goas Froment

la chapelle des sept saints
La journée se termine à la chapelle des Septs-Saints, qui abrite dans la crypte, sous le dolmen accolé à la chapelle, les sept saints dormants d'Ephèse (grand port grec d'Ionie, aujourd'hui en Turquie). Louis Massignon a été à l'origine d'un pélerinage islamo-chrétien qui a lieu ici chaque année depuis 1954, et est toujours très fréquenté. Le guide habituel de la chapelle nous chante une partie de la gwerz des Sept Saints qui raconte leur vie légendaire.

Emmurés dans une caverne vers 250 par le tyran Decius, ils se réveillèrent 177 ans plus tard, lorsqu'on ouvrit leur tombeau. Leurs noms sont donnés dans la gwerz longue de 54 versets : Maximien, Marc, Martinien, Denis, Jean, Sérafion, Constantin, et sont à peu de chose près identiques à ceux donnés par Jacques de Voragine dans « La Légende Dorée » ( où Marc est Malchus et Martinien est Martien) . Il y a une similitude entre la partie la plus ancienne de la gwerz et le début de la sourate 18 du Coran sur « la caverne ». Cette légende n'a aucun lien apparent avec les sept saints fondateurs de Bretagne. Rien ne permet d'affirmer qu'il y a eu substitution de culte.  
Les sept saints dormants sous le dolmen

Nous finissons la journée sous l'ombre des arbres qui entourent la chapelle, après une belle journée ensoleillée.

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